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Prismes de sens et de sensations

par Raphaëlle de Groot et Gabrielle Larocque


Artiste et collaboratrice de l'Hippocampe


Janvier 2022


La première étape de participation s’achève. Nous nous mettons à l’écoute des sens et des sensations partagés par les participants et les participantes que nous avons rencontrés à l’automne 2021, directement ou indirectement, grâce à des traces comme des mots, des enregistrements, des dessins, des photographies, des collages transmis par les médiateurs et médiatrices des Constellations de l’hippocampe. Points de vue particuliers de la ville, ces expériences esquissent différents paysages à travers le goût, l’ouïe, l’odorat, la vue et le toucher. Ils sont ancrés dans les fonctions et les besoins du corps. Ils sont intimement liés au vécu émotif et affectif. Ces paysages sont des prismes sensoriels dont les échos rebondissent sur autant de parois qu’il y a d’enjeux humains vécus sur l’île que l’on nomme aujourd’hui Montréal.

Jean-Manuel Gionet, 30 août 2021

Goût

La nourriture. Montréal par la bouche, c’est l’appartenance culturelle, le métissage. C’est l’abondance d’aliments, l’architecture de la nourriture, les bâtiments qui la produisent, les trajets qu’elle parcoure, les quartiers qu’elle n’atteint pas. « Montréal goûte le béton », « la neige pleine de pipi jaune : beurk ! » C’est aussi la faim et son revers, la drogue comme nourriture, la survie, la solidarité, l’aide alimentaire, la sécurité alimentaire, la santé, l’accès aux aliments frais et aux ressources. L’abondance aussi. « Montréal, c’est la cerise sur le sundae. » Répondre à des besoins de base.

Joe Passalacqua, 25 janvier 2022

Odorat

Bonnes et mauvaises odeurs. Vidanges nauséabondes, poubelles, compostage, recyclage. La nourriture qu’on a oubliée. Pizza sous la neige. Usines qui puent et qui sentent bons, celles à chocolat, à biscuits, ou à confiserie. Humer les bonbons, la bière, le gaz, les raffineries, la pollution, la campagne, la terre, les fleurs, les marchés, l’asphalte après une pluie d’été, l’humidité. Arômes de bagels, de pâtisseries, de pain, de la cuisine des autres. Ça sent les soupes populaires, les cafés, la cannelle, les épices, le pot, la cigarette. Pouvoir respirer l’air frais.


Gabriel Gagnon, 14 décembre 2021

Ouïe

Montréal s’entend par les sons des apéros, des bars, des terrasses, par sa vie nocturne, ses tambours, ses défilés et ses spectacles de rue. Musique du monde, sons exotiques, feux d’artifice. Parcs animés, voix des gens, musique des autres, enfants qui jouent, chants d’oiseaux, écureuils, chiens qui grognent et aboient. Coups de fusil. Cloches, aiguiseurs de couteaux. Corne de brume. Hockey. Trompette. Ville chantée sur tous les tons. Céline Dion qui chante la paix sur la terre. Ginette Reno sur un balcon. « Je reviendrai à Montréal. » « Mon pays, ce n’est pas un pays, c’est l’hiver. » Déneigement, bruits de camion, construction, trafic, auto, bus, klaxons, avions, trains, voies ferrées, métro, travaux, bateaux commerciaux. Développer sonne faux.

Imane et Sherley, 7 octobre 2021

Vue

Être sollicité par beaucoup d’informations. Densité de stimuli. Être au centre de l’action. La ville est grise et possède de multiples couleurs, saisons, décorations, lumières qui brillent. Diversité des quartiers. Voir la disparition ou le commencement. Devant quoi les adultes s’inquiètent, alors que les enfants, eux, s’en émerveillent, découvrent. On voit la précarité et on veut la changer. Usines désaffectées, seringues, cônes, animaux morts. On cherche les signes de la nature. « Montréal = violence. » Profilage racial, stigmatisation, invisibilité, effacement, banalisation. Peu de traces des cultures autochtones. Se reconnaître ou pas. Être vu ou pas, ignoré ou pas, respecté ou pas. Apparaître.

Jerry Nadon, 13 octobre 2021

Toucher

Vouloir ou ne pas vouloir toucher. Pouvoir ou ne pas pouvoir toucher. Toucher l’herbe et suivre l’insecte qui y vit, tâter la brique, les bâtiments, l’asphalte, le ciment, la pierre, piétiner le béton irrégulier. C’est dur, c’est rugueux. Où est le doux, le lisse, le moelleux ? C’est différent pour chacun et chacune. « Montréal, c’est comme de la mousse blanche : ça a l’air gros mais c’est léger. » « Montréal a la texture d’une feuille de concombre. » Aimer la propreté, dédaigner la saleté. Être discriminé par dédain. Soins et besoins du corps. La sensation d’un rein en moins puisqu’on l’a vendu. Lieux pour se laver et se vêtir. Se sentir en sécurité ou pas. Tapis de neige, feuilles mouillées. Sentir le vent, sentir le froid. Se déplacer librement, tracer ses trajets, Triangle des Bermudes. Parcourir le territoire ou être limité à des lieux accessibles, rares, fragmentés. Comme une pâte à modeler, transformer son quartier.

Robert Dantiste Jr., 30 août 2021

Merci à toutes les personnes qui ont partagé leurs sens et sensations de la ville !


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